Kokeshi : histoire et fabrication de la célèbre poupée japonaise
L’archipel nippon est une terre où la modernité et la tradition forment les deux faces d’une même pièce. La kokeshi, poupée en bois sans membres, reflète très bien cette dichotomie. Mondialement célèbre, son origine est restée floue. Très simple dans sa réalisation, il n’existe pourtant pas deux kokeshi identiques. De son histoire à sa fabrication, découvrez ce petit bijou d'artisanat, symbole du Japon.
Kokeshi : origine et histoire de la poupée japonaise
Poupées typiques de la région du Tôhoku, la kokeshi est composée d’une ou deux pièces de bois qui lui donnent sa forme caractéristique : une simple tête et un tronc sans bras ni jambes.
Il semblerait que les poupées kokeshi traditionnelles aient été fabriquées pour servir de jouet aux enfants de la région de Tôhoku il y a plus de deux siècles. Fabriquées par les kijiya, des artisans spécialisés dans la fabrication d’objets en bois, elles étaient sculptées à partir des chutes de bois, puis vendues aux habitants de la région et aux touristes des sources chaudes. Menuisiers nomades, ils avaient la particularité de fabriquer leurs bols japonais, plateaux et autres objets à l’aide de tours en bois.
Certains pensent que la kokeshi est un porte-bonheur, qu’on offrait pour souhaiter un bon rétablissement, des récoltes abondantes ou la bonne croissance d’un enfant.
D'autres supposent que les premières kokeshi en bois étaient fabriquées en mémoire des enfants disparus prématurément, ou sacrifiés au cours de périodes sombres de l’histoire nippone, marquées par la famine.
Dernière théorie : pendant la période Edo, les poupées étaient très à la mode. Les kokeshi en bois seraient donc des versions plus abordables d’autres poupées d’époque comme les poupées karakuri.
Kokeshi : signification et étymologie du mot
L’origine du mot kokeshi est, elle aussi, très obscure. Initialement, les poupées portaient leur nom en fonction de leur lieu de fabrication. On les appelait dekoroko, houko ou encore kogesu. Ou tout simplement comme kigata ko, le terme général qui était utilisé pour parler de tous les types de poupées.
Il a toutefois été décidé en 1940, lors d’une grande exposition de kokeshi parrainée par le Kokeshi Club, que le mot kokeshi s'écrira désormais こけし, en hiragana, et qu’il servirait de nom standard à ce type de poupée, afin de les séparer des autres.
D’après Tomiya Amae, l’auteur du premier ouvrage entièrement dédié aux kokeshi publié en 1928, le terme kokeshi serait une combinaison du mot ko (arbre), ke, pour l’abréviation de kezuri (affuter comme un crayon) ou kezuru (raser, raboter) et shi (utilisé comme particule conjonctive liant le nom à la fabrication de la poupée).
On voit souvent écrit que kokeshi, proviendrait du kanji ko (enfant) et keshi qui, utilisé dans ce contexte, signifie extinction, d'où la traduction finale “mort d’un enfant”. Cette signification est de plus en plus controversée par les artisans. Si vous voulez en savoir plus sur ce sujet, et que vous parlez anglais, vous pouvez consulter une thèse très intéressante sur le sujet, de Jennifer McDowell pour l’Université de Pittsburgh, parue en 2011.
La kokeshi : signification des couleurs et symbolique
Le rouge est très souvent utilisé pour peindre les motifs des kokeshi. Couleur porte-bonheur au Japon, les kokeshi peintes de rouge auraient la réputation de tenir éloignés les mauvais esprits et souhaiter un bon rétablissement ou une bonne santé.
Mais on peut aussi retrouver d’autres couleurs ou motifs. Plus qu’une symbolique, ces décorations dépendent surtout de l’artisan et de la “famille” à laquelle il appartient.
L’art de la fabrication de la kokeshi traditionnelle se transmet de maître à élève. Pour cette raison, la décoration et la fabrication de cette statuette en bois subissent des restrictions en fonction de “la lignée” de l’artiste qui la fabrique.
Les différents types de poupées kokeshi
Il existe 3 grands types de kokeshi.
La kokeshi traditionnelle
On parle de kokeshi traditionnelle quand sa fabrication est transmise d’un maître (sensei) à son élève. Il existe 11 types ou famille de kokeshi traditionnelle :
- La kokeshi Tsuchiyu, préfecture de Fukushima, est toute simple. Elle est ornée de traits multicolores.
- La kokeshi Yajiroo, préfecture de Miyagi, ressemble à celle de Tsuchiyu. Sa particularité, ce sont ses traits colorés qui ornent le haut de la tête et donnent l’impression que la poupée porte un béret.
- La kokeshi Toogatta, préfecture de Miyagi est une des plus anciennes familles de kokeshi. Elle est souvent décorée de chrysanthèmes ou de fleurs de prunes.
- La kokeshi Zaoo, préfecture de Yamagate, est une famille dérivée de la tradition de Toogatta, mais le tronc de ce type de poupée est beaucoup plus large.
- La kokeshi Sakunami, préfecture de Miyagi, serait la plus ancienne famille de kokeshi. Elle se caractérise par le bas du visage et du tronc plus évasé et fin que le haut. Elle est souvent décorée d’un chrysanthème.
- La kokeshi Yamagata, préfecture de Yamagata, se distingue par une expression triste. Elle peut être décorée de nombreuses manières.
- La kokeshi Naruko, préfecture de Miyagi, est évasée au centre du tronc et est décorée de chrysanthèmes aux couleurs vives.
- La kokeshi Hijioi, préfecture de Yamagata, est un mélange des familles Naruko et Toogatta. Elle possède une expression du visage très particulière.
- La famille Kijiyama, préfecture d’akita, est fabriquée en un seul morceau de bois. C’est la seule kokeshi “portant” une sorte de kimono japonais.
- La famille Nambu, préfecture d’Iwate, est très sobre dans sa décoration. C’est sa forme qui la rend particulière.
- La kokeshi Tsugaru, préfecture d’Aomori, est certainement la famille la plus récente. Elle se distingue par une coupe au carré et un visage très expressif.
Les kokeshi créatives
Ce sont des poupées en bois aux formes et couleurs beaucoup plus créatives, aussi appelées sosaku kokeshi.
Qu’est-ce qui fait que ces sculptures sont considérées comme des kokeshi ? L’utilisation d’un tour en bois pour les fabriquer.
Mais au delà de ce simple critère technique, ce sont bien les sosaku kokeshi qui aujourd'hui ont repris le flambeau de la fabrication artisanale de ce symbole du Japon traditionnel.
Fabriquées principalement dans la préfecture de Gunma, elles ont su donner un souffle nouveau à cette pratique artisanale qui tombait alors en désuétude.
Contrairement aux kokeshi traditionnelles, il n’y a ni règles créatives à respecter ni contraintes géographiques. Il n’y a donc pas besoin d’être un trésor national du Japon pour avoir l’occasion de créer de magnifique kokeshi, comme le prouve Patrick kokeshi, un artisan local dont les créations sont reconnues jusqu’au Japon.
Les kokeshi Kimmidoll et autres inspirations
Forte de son succès, la poupée kokeshi s’est mondialisée. Il est aujourd’hui très facile de trouver des figurines décoratives non japonaises vendues sous le terme de “kokeshi”. On appelle ce type de statuettes les “nouvelles kokeshi”.
Ce sont des kokeshi fabriquées et commercialisées en série. La décoration de ces kokeshi est beaucoup plus libre que celle des kokeshi traditionnelles. Elles n’ont pas de restriction sur la décoration et ne sont pas nécessairement fabriquées au Japon.
Inspirée de la kokeshi traditionnelle, on retrouve, par exemple, la célèbre poupée kimmidoll. Cette petite figurine en plastique aux couleurs flashy n’est pas japonaise, mais Néo-Zélandaise (bien que sa fabrication reste asiatique). Elle est souvent offerte comme porte-bonheur ou comme objet de décoration kawaii, s'appuyant sur un code couleur qui n'a aucun lien avec les traditions japonaises.
Les étapes de fabrication de la kokeshi traditionnelle
La kokeshi traditionnelle est entièrement en bois. Sakura (cerisier), itaya momiji (érable japonais), mizuki (cornouiller) ou plus rarement nashi (poirier japonais), le choix du bois est important. Il donnera à la kokeshi sa couleur et son aspect final.
Bien qu’elle soit simple par sa forme, une simple tête et un tronc, la kokeshi traditionnelle est unique. Il n’y a pas deux poupées identiques. Ce qui permet de la différencier, c’est la façon dont ses yeux, son nez et sa bouche seront peints qui lui donnera son expression caractéristique.
Traditionnellement, c’est le même artisan qui s’occupe de la sculpture et de la peinture de la poupée. Le choix du bois, de la forme, des motifs, de l’expression de la poupée et ses couleurs lui appartiennent. C’est cette particularité qui fait de chaque kokeshi traditionnelle, un objet unique.
Voici quelques grandes étapes de la fabrication des kokeshi :
- Le bois est découpé et mis à sécher pendant 1 à 5 ans.
- Quand il est sec, il est découpé en tronçons qui donneront leur taille aux kokeshi.
- Les morceaux de bois sont ensuite nettoyés et polis.
- L’artisan sculpte la forme de la kokeshi à l’aide d’un tour à bois. Progressivement, il affine la forme à l’aide de différents outils et ciseaux à bois. Les kokeshi sont ensuite polies au papier de verre et peintes.
- Pour conserver la couleur pendant de longues années et protéger la poupée en bois, la kokeshi est remise sur le tour pour être recouverte d’une cire transparente.
Et pour retrouver les étapes de fabrication en image :
Pour reconnaître une authentique kokeshi japonaise, il vous suffit de la retourner. Vous retrouvez en dessous le symbole de l’artisan qui l’a confectionnée.
Découvrez les kokeshi au Japon
Berceau de la poupée Kokeshi, la préfecture de Miyagi est une destination parfaite pour tous les amoureux de la poupée japonaise traditionnelle.
Vous pourrez visiter le village des kokeshi et vous initier à l’artisanat traditionnel des “Yajiro kokeshi”. La Yajiro kokeshi tire son nom de son village natal. Vous y trouverez un musée consacré à la célèbre poupée, une salle d’exposition, ou encore une activité de peinture de kokeshi.
Si vous avez décidé de voyager au Japon début mai du côté de Shiroishi, vous tomberez certainement sur le Concours de Kokeshi, le plus grand festival de kokeshi du Japon.
Le premier weekend d’octobre, vous pourrez participer au Festival national des poupées kokeshi de la ville d’Osaki, toujours dans la préfecture de Miyagi.
Si vous avez prévu de profiter des sources chaudes, ou onsens, de la ville de Naruko, pensez à visiter le quartier des kokeshi. Vous pourrez y retrouver des ateliers de fabrication, des boutiques-souvenirs, mais surtout, des objets du quotidien en version kokeshi.
Et si vous n’avez pas l’occasion de voyager au Japon, mais que vous habitez ou veniez en vacances dans les environs de Colmar, nous organisons ponctuellement des ateliers de peinture de kokeshi.
Si vous recherchez un objet traditionnel japonais, la kokeshi est parfaite. Preuve d’amour et d’affection, vous pourrez l’offrir comme porte-bonheur à une personne de votre entourage. Si vous recherchez d’authentiques kokeshi fabriqués à la main, vous pouvez vous faire plaisir avec notre sélection de poupées kokeshi.
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